Claire Korber : découvrez son univers illustré

Claire Korber : découvrez son univers illustré

Une amoureuse de la couleur

Une amoureuse de la couleur

Bonjour Claire, je suis ravie de commencer ce mois de mai pour parler d’avantage de ton univers mais aussi de tes sources d’inspirations aussi riches que les couleurs que tu utilises dans tes peintures.

Si tu le veux bien nous allons remonter dans le temps afin de parler de ton parcours, de tes études jusqu’à aujourd’hui. Dis-nous tout !

Comme beaucoup d’illustrateurs, je dessine depuis l’enfance. Dès la maternelle, j’ai voulu dessiner les choses comme elles sont, de manière réaliste. Je me souviens d’un exercice où il fallait dessiner des îles. Tous les élèves avaient utilisé toute sorte de couleurs : du bleu, du rose, du jaune. Et moi : du marron, du vert foncé, du vert clair. Cela m’a marqué.

J’ai ensuite continué de griffonner des dessins sur l’ensemble de mes copies et cahiers. Etant donné mon goût des sciences, en particulier des sciences naturelles, je choisis de faire un Bac Scientifique. C’est à ce moment là que j’entends parler du métier d’illustrateur scientifique. Incroyable un métier qui réunirait à la fois arts et sciences. Je me renseigne sur les formations dans cette voie et apprend quelle n’est accessible qu’après un BAC +2. A l’issu du lycée, logiquement, j’hésite entre Fac de biologie et études d’arts. Ma sœur poursuivant des études de design d’espace à l’école de Condé à Paris, ce qu’elle fait me plait et je me projette dans une filière similaire. J’intègre donc la même école en Mise à niveau en arts appliqués.

Les portraits colorés comme les paysages sont au coeur de ses créations.

Les portraits colorés comme les paysages sont au coeur de ses créations.

Là, j’y découvre le design, je dessine tout le temps, je suis convaincue de m’être bien orientée. J’hésite entre toutes les spécialités du design car elle me plaisent toutes, je finis par choisir le BTS Communication visuelle, l’ancien nom du BTS Design graphique, plus en lien avec mon gout des images et du dessin. A l’issus de mon BTS, je repense à l’illustration scientifique. La formation idéale est proposée par l’école Estienne et je sais qu’il me sera très difficile d’y être acceptée. Je passe néanmoins les concours. Je reçois ma lettre d’admission en juin 2011. C’est un bonheur fou.

La formation est à la hauteur de mes attentes. Je m’y épanouie pleinement, entre cours d’anatomie et dessins hyperréalistes. Je termine mes études en design par un master 2 à l’ENS Cachan où je suis des cours avec des étudiants passants l’Agrégation d’Arts appliqués. C’est ainsi que me vient l’idée de passer moi aussi ce concours et de devenir professeur. Pour cela, je suis une formation à la Sorbonne, ainsi que quelques cours auxquels j’ai l’autorisation d’assister à l’ENS.

Je bachotte la philosophie de l’art et l’histoire du design et j’adore ça ! Je suis reçue à l’agrégation en 2015. Je deviens donc prof, et je maintiens une activité freelance à côté. A ce moment là je suis encore en contact avec les étudiants d’illustration scientifiques de l’Ecole Estienne. C’est ainsi que je rencontre Marine Joumard, et l’amour, et par son bais Les Petits Mondes ! La boucle est bouclée !

Pour finir, en 2019, je me mets à mi temps et fonde un atelier de design graphique et illustration avec la designeuse graphique Alissa Genevois qui s’appelle Atelier Kaboom. Une nouvelle aventure en démarrage !

Jamais sans son carnet de croquis, Claire s’inspire des paysages qu’elle traverse.

Jamais sans son carnet de croquis, Claire s’inspire des paysages qu’elle traverse.

Pour ceux qui ne connaissent pas tes créations pourrais-tu nous en dire quelques mots ?

Comme tu l’as peut être compris, voulant tout faire, j’ai eu du mal à choisir pendant un temps. C’était pareil pour les outils et techniques plastiques. J’ai eu une grosse phase hyperréaliste au crayon de couleurs et aquarelle, une phase linogravure (mais pas aussi maitrisée qu’Amelie Boquet !), une phase inspiration gravure au stylo noir, pour enfin découvrir pleinement les feutres gouache Posca !

Ça a été le coup de foudre. Les Poscas ont résolu mon éternel problème qu’était celui de Matisse dans les année 20 : celui du conflit entre le dessin et la couleur. En d’autres termes entre le trait et le remplissage. J’ai l’impression qu’avec le Posca je dessine et je peins en même temps. Je sculpte les masses aussi bien que je les mélange. Aucun autre outil ne m’avait permis une représentation réaliste et synthétique à la fois. C’est avec les Poscas que je découvre également ma passion des couleurs vives, fluo, et des contrastes doux ou tranchants naissent de leurs associations. C’est aussi à ce moment là, donc 20 ans plus tard, que je m’affranchie totalement du réalisme des couleurs. Je crois que les couleurs acidulées et un dessin entre réalisme et synthèse, définissent assez bien mon style.

Des portraits aux couleurs vives : sa signature.

Des portraits aux couleurs vives : sa signature

Tout commence par un voyage

Si je te dis « voyage », tu me réponds :

Ami.e.s. Sans hésiter. Car quand je voyage je vais en général voir des amis à l’étranger. Jai la chance d’avoir des amis tout autour du globe, c’est une richesse infinie. Mes amis m’invitent à rentrer dans leurs petits mondes et c’est ainsi que je découvre leur ville ou partie du pays. J’ai adoré Bangkok, Abidjan, Dakar…

Abidjan de la série Glimpses

Abidjan de la série Glimpses

Mais c’est Singapour qui m’a le plus marquée. C’est un pays d’une modernité saisissante sur le plan architectural et en même temps extrêmement végétalisé. Mon plus beau souvenir a été l’entrée à Garden by the Bay et la rencontre avec les structures végétalisées géantes et futuristes.

C’était un sentiment sublime incroyable, entre beauté et démesure de la grandeur. Je ne sais pas si je dois le dire ma j’ai une illustration de Singapour qui attend d’être imprimée ! Oups, c’est dit !

Singapour, le point de départ d’une future illustration

Singapour, le point de départ d’une future illustration

Singapour : la version illustrée

Singapour : la version illustrée

Tu utilises parfois la photographie comme étape de ton travail graphique, est ce que chaque photo est pensée comme travail préparatoire à la peinture ou bien tu alternes les deux au fil de tes créations ?

La photographie c’est la captation de l’instant présent. Le croquis est trop lent pour cela, ça ne me satisfait pas. J’ai besoin de la photographie pour garder une trace de l’ambiance, de l’attitude des figurants, des objets laissés là dans un coin. C’est vif et spontané alors que je mets plusieurs heures à faire mes peintures.

Il y a des voyages que j’ai faits il y a quelques années. Je me replonge dans les photos et j’en sélectionne en vue d’une illustration. Ça ne me gène pas qu’elles n’aient pas été prises pour une illustration, au contraire, c’est plus spontané. C’est vrai qu’aujourd’hui, il m’arrive aussi de prendre une photo parce que je me dis que la scène devant laquelle je me trouve donnerait une belle peinture. Je choisis ou réalise une photo d’abord en fonction de mes envies de sujet. En tous cas, j’ai beaucoup de mal à faire une illustration d’un endroit où je n’ai pas été.

La photo, c’est aussi mon regard sur le lieu à ce moment-la. Je choisis mon sujet et mon cadrage. Avec l’illustration, je réinterprète ensuite ces photographies. Si la photographie me satisfait entièrement, je vais simplement sélectionner ma gamme de couleur et la reproduire. Mais souvent, j’aime créer de nouvelles compositions et j’assemble alors plusieurs photographies. C’est un peu comme un plat sur le feu où je mélange un peu de tout, il faut juste que la sauce prenne !

Croquis coloré

Tu es enseignante également, et pour les personnes qui nous lisent on se pose la question de l’organisation entre journée type au lycée et envies créatives. Concrètement comment ça se passe ? Tu as toujours tes poscas dans la trousse, prête à croquer une scène de vie ou bien tu attends de rentrer chez toi ?

C’était assez compliqué lorsque j’étais prof à temps plein. Maintenant, j’ai des jours dédiés pour les cours, et des jours dédiés à l’Atelier Kaboom. Mes envies créatives personnelles, je les réservent pour mes soirées, mes week-end, les vacances scolaires et de temps en temps entre deux projets Kaboom !

C’est plus facile de faire des croquis car c’est beaucoup plus rapide (quoi que certains croquis…), donc il m’arrive d’emporter mon matériel et de le sortir dans le RER, à la terrasse d’un café ou dans un parc… J’adore dessiner les élèves au boulot quand je surveille le bac !

Une session bac croquée par Claire

Une session bac croquée par Claire

Ses sources d’inspiration : du naturalisme au graphisme

Pourrais-tu nous dévoiler tes influences artistiques, le travail d’artistes que tu aimes et qui t’accompagne ?

J’aime des artistes très divers. Les dessinateurs naturalistes comme Heackel, Doré, Redouté. Le réaliste Repine, Jacques Monory du mouvement figuration narrative. Pour la figuration, je dois avoir un petit coté réactionnaire, j’aime quand c’est réaliste, et un peu léché. Tout à l’heure j’ai cité Matisse alors que je ne suis pas une grande fan, mise à part de ses couleurs.

J’aime aussi des artistes abstraits : Pierre Soulage, Simon Hantaï, Keith Haring. Leur radicalité les amène presque du coté du graphisme.  Je suis évidemment très inspirée par des artistes et illustrateurs contemporains que je suis sur Instagram : Marie-Laure Crushi, Tom Haugomat, Sam Friedman, Cosimo Galluzzi, Stephen Post, Olivier Bonhomme, Olumide Oresegun, Surudenise

Pourrais-tu nous décrire ton lieu de création et d’inspiration préféré ?

Mes arrières grands-parents avaient un appartement dans la Villa Sofia à Anglet, sur la côte basque. Il y a quelques années, avec mon Père et ma sœur, nous avons passé 3 ans à le rénover entièrement. Depuis, j’y vais dès que je le peux. En plus de la beauté de la bâtisse, j’adore le pays basque. Les paysages du littoral m’inspirent. J’aime me promener à Biarritz le long de la côte, les jours ensoleillés, mais aussi les jours brumeux lorsque les vagues se déchirent sur les rochers sous un ciel tourmenté.

Souvent, je prends des photos et une fois rentrer à la Villa Sofia, je sors mes Poscas et me laisse enivrer par les paysages. Je me sens bien à dessiner au milieu du salon, entre les meubles anciens achetés par mes arrières-grands parents, les toiles peintes par ma sœur et moi accrochées aux murs, à coté de l’enceinte fabriquée par mon père. La Villa Sofia c’est avant tout une histoire de famille.

La Villa Sofia à Anglet

La Villa Sofia à Anglet

Son bureau aménagé dans la maison

Son bureau aménagé dans la maison

Les paysages inspirants de la côte basque

Les paysages inspirants de la côte basque

Biarritz l’une de ses illustrations inspirée par les paysages de la côte Basqu

Biarritz l’une de ses illustrations inspirée par les paysages de la côte Basqu

Prochainement …

Pour terminer Claire, quelques mots sur ton actualité. Quels sont tes projets, tes envies ?

J’ai constamment envie de produire d’avantage d’illustration, de les aboutir plus, d’innover plus. En ce moment, j’ai envie d’explorer des univers surnaturels, et en même temps je reste très attachée à la représentation du réel, du quotidien. J’ai donc ressenti le besoin de faire un inventaire de mes productions, une sorte d’état des lieux.

L’ensemble de mes peintures est désormais consultable sur le site de l’Atelier Kaboom, rubrique « galerie ». D’ailleurs, développer les activités de l’Atelier est aussi une de mes priorités car si j’adore l’illustration, je suis également une passionnée de graphisme ! Voilà, j’ai beaucoup d’envies et de projets d’illustration. En ce moment, j’entame une nouvelle série d’illustrations de la cote basque… plus fantasque que d’habitude. À découvrir, je l’espère, bientôt !

Bonus : la mini-playlist « On écoute quoi chez Claire ? »

  • Starstruck – Santigold
  • Energy (Stay Far Away) – Skepta, WizKid
  • All The Stars (with SZA) – Kendrick Lamar, SZA
  • Detox – Angel Haze
  • Adonai – Sarkodie, Castro
  • Gravedigger’s Chant – Zeal & Ardor
  • Django Jane – Janelle Monae
  • Hornet – Christopher Larkin
  • Lucifer (No Doubt) – Nneka
  • Better – Estelle