Amélie Boquet : découvrez son univers illustré
- 31/07/2020
- Le petit monde de
De l’urbanisme à la gravure
Bonjour Amélie, à l’heure du printemps mais aussi en cette période si particulière de confinement, merci de m’accorder un peu de ton temps pour nous parler de ton travail, de ce qui t’inspire et t’anime dans ton quotidien de femme mais aussi d’artiste.
Alors pour commencer pourrais-tu nous dire quelques mots sur ton parcours ?
J’ai toujours été manuelle et créative depuis toute petite, j’ai toujours dessiné, peint, fait du modelage, de l’aquarelle et exprimé mon imaginaire de cette façon. A l’école mon truc préféré c’était les rédactions et les dessins qui devaient les accompagner puis les cours d’arts plastiques. C’est une part très importante de ce que je suis, pour autant j’ai fait des études plus classiques.
J’ai fait des études d’urbanisme et j’ai exercé ce métier pendant près de 10 ans. Mon dernier poste était celui de Directrice de projet dans une commune urbaine juste à coté de Lille. Je pilotais un gros projet de rénovation urbaine et devais coordonner l’ensemble du partenariat mobilisé pour mener à bien ce projet sur plusieurs années. C’était une mission très pluridisciplinaire, dynamique et passionnante mais aussi extrêmement fatiguantee, mon rythme de vie professionnel était très intense. La vie et ses aléas ont remis la créativité et le travail manuel comme une priorité vitale pour moi et m’a poussé à ce changement de vie professionnel que je n’ai pas regretté un seul jour depuis.
Amélie Boquet en pleine séance de gravure. Portrait par Capucine Lamoitte
Dans un tiroir, les trésors d’Amélie. Par Capucine Lamoitte
Et comment as-tu découvert la linogravure ? Et pour ceux qui ne connaissent pas cette technique, peux tu la présenter en quelques mots ?
J’ai découvert la pratique lors d’un atelier de création de livre, lors duquel toutes sortes de matériaux et de techniques étaient mis à disposition. Je suis tombée complètement amoureuse des sensations des gouges qui gravent la matière. En rentrant je me suis tout de suite équipée et j’ai fais mes premiers grands formats peu de temps après, je me suis fait la main toute seule, réalisation après réalisation.
Un quotidien créatif et poétique
Tu animes également des ateliers « Gravure sur tampon » et « d’ impression sur textile » pour petits et grands depuis plusieurs années, et tu en confectionnes de magnifiques tampons pour des créateurs, des artisans, des commerçants. Pourrais tu nous parler de cette autre partie de ton activité ?
Lorsque j’ai créé mon entreprise il y a bientôt 3 ans j’ai tout de suite proposé des ateliers, et c’est mon activité principale. Ce sont des moments créatifs et joyeux. J’aime accompagner les enfants, les adultes et pour moi le plus important c’est que chacun puisse exprimer ses envies, sa créativité, je pense qu’en art le chemin est tout aussi important que le résultat final, et le plaisir est le moteur principal.
La création de tampons pour les artisans est quelque chose qui est venu toute seule très rapidement. La première commande est venue d’un salon thé de Lille que j’adore, le Sweet Flamingo qui avait envie d’un tampon à la leur effigie pour les sachets de gâteaux à emporter. C’est quelque chose que j’adore faire, déjà parce que je suis moi même consommatrice de petits cafés, de petites adresses indépendantes, et puis j’aime le travail sur commande et sur mesure, le fait de pouvoir répondre aux besoins d’entrepreneurs est un vrai plaisir. J’ai aussi de plus en plus de demande de création graphique et d’identité visuelle et je dois dire que cela fais vraiment partie de ce que je préfère faire !
Comme tu le sais la création d’une étiquette de bière pour la Agora Artisans Brasseurs de Carpentras, rencontrée avec toi, a été une de mes plus belles expérience jusqu’à lors ! Ce sont des relations chouettes avec les gens et puis il y a le défi de devoir respecter un cahier des charges précis, tout en exprimant sa propre créativité. L’équilibre entre toutes ces activités me convient.
Tiroir aux essences, inspirations fleurie et poétique.
Création graphique et réalisation du logo pour un Bed & Breakfast en Haute Savoie: La marmotte qui papote.
Comment organises-tu ton temps entre commande professionnelle et création personnelle ? Est-ce que parfois l’un prend le pas sur l’autre ?
C’est très variable en fonction des périodes. Mes missions se repartissent entre mes ateliers, majoritairement dans des structures, mes gravures pour Les Petits Mondes et celles pour mes autres collections et la création de tampons et de création graphique.
Je pense que mon ancien métier ayant été principalement du pilotage et de la méthode, de l’organisation, cela a clairement aidé pour savoir comment m’organiser une fois lancée en solo. Il y a donc des périodes où je vais être plus mobilisée sur telle ou telle part de mon activité mais cela s’équilibre toujours au final. Et puis cela me convient bien parce que la créativité est vraiment quelques chose de très cyclique, il y a des périodes très riches d’idées, d’énergie et d’autres qui le sont moins et ma posture est de toujours les prendre comme elles arrivent.
Les gouges, son précieux matériel pour confectionner les gravures
Ses sources d’inspiration
La nature et plus précisément le floral et le végétal sont des univers présents dans ton travail. Tu es très attachée aux petits trésors du quotidien, que tu aimes observer et collectionner … Peux-tu nous en dire plus sur tes sources d’inspiration ?
La nature a en effet toujours été ma source d’inspiration. J’ai grandit à la campagne, passé beaucoup de temps au jardin, à jouer, à jardiner avec ma maman et aussi à m’émerveiller sur des toutes petites choses font vraiment partie de mon éducation depuis toute petite. Des choses transmises par ma grand mère et ma mère : d’observer la coccinelle ou la fleur que j’ai sous les yeux. Et j’ai toujours aimé les beaux objets, les petites choses que l’on trouve par terre dans les rues des villes, les braderies aussi avec plein de petits trésors anciens.
Dans le jardin d’Amélie, la récolte des pétales de rose.
Pourrais-tu nous dévoiler tes influences artistiques, le travail d’artistes que tu aimes et qui t’accompagne peut-être?
Je dois dire que je n’ai pas de connaissance académique de l’art, je ne connais pas bien les mouvements etc… Mon inspiration est plutôt liée à la façon dont je vais être portée par des ambiances et des émotions. J’ai toujours un oeil tourné vers le passé, j’aime les ambiances et l’esthétique d’autres périodes et d’autres endroits, que ce soit les habitations, les paysages, les vêtements, les objets de tous les jours et l’art également. J’aime beaucoup certaines périodes, comme la fin du 19 ème, début 20eme mais aussi les 30 glorieuses.
Enfant j’étais aussi fascinée par les fossiles, les dinosaures puis l’Egypte ancienne, les hiéroglyphes mais aussi les documentaires de Cousteau. Il y a aussi des livres pour enfants allemands ou d’Europe de l’Est qui m’ont marqué, que j’’adorais et dont l’esthétique est très différente de l’esthétique française. Comme je suis quelqu’un de très visuel, je suis toujours très fortement imprégnée de films et de séries d’époque. Je travaille d’ailleurs très souvent avec l’un ou l’autre en fond, j’adore être dans ce genre d’ambiances. Et sinon souvent avec des émissions de radio, celles sur les découvertes, la nature, les sciences de la terre, comme « Du vent dans les synapses » ou l’émission de musique « Very Good Trip » sur France Inter, toujours passionnantes. Les émissions de jardinage anglaises de Monty Don aussi (autre passion chez moi !) c’est vraiment tout cela qui nourrit la création, je crois que je ne crée jamais dans le silence d’ailleurs !
Pour citer des artistes, spontanément ce sont plutôt des photographes qui me viennent à l’esprit : Jaques-Henri Lartigue ( le travail et l’homme, son imagination, sa drôlerie), de Robert Capa (ses photos de l’Italie d’après guerre) et de Slim Aarons (ses photos autours de piscines dans les années 1960).
Magnolia, gravure originale pour Les Petits Mondes. Photographie par Capucine Lamoitte
Et si l’on vient chez toi à Lambersart, que peut-on trouver sur les murs, les étagères de ta bibliothèque, dans les cadres, dans ton atelier?
Beaucoup de choses ! Je ne suis pas vraiment minimaliste lorsqu’il s’agit de la décoration, c’est un joyeux mélange de meubles et d’objets anciens. Je suis fan des trouvailles de braderie, on va retrouver plusieurs photographies de Slim Aarons aussi, quelques gravures anciennes offertes par ma grand mère, du bois gravé, des planches botaniques, des planches anciennes achetées en bouquinerie, beaucoup de plantes, des pierres semi précieuses dont certaines que je traine depuis mes 7 ou 8 ans, les peintures abstraites de mon ami le peintre Jean-Michel Salaün. Et beaucoup de choses ramassées : des pommes de pins, des petits brillants en laiton trouvé part terre…
La bibliothèque est essentiellement composée de romans (une recommandation : « Bénis soient les enfants et les bêtes » de Glendon Swarthout ) et coté beaux livres ce sera des livres sur le design d’intérieur des années 60, 70 , des livres des photographes que j’ai cité, de vieux bouquins d’art-plastique des années 70 (j’en ai une petite collection maintenant !).
Photographie par Capucine Lamoitte
Le petit monde d’Amélie : objets chinés, héritages familiaux et trésors du quotidien ont leur place dans sa maison à Lambersart.
A venir …
Pour terminer Amélie, quelques mots sur ton actualité. Je sais que tu viens d’accueillir un nouveau petit membre dans ta famille, est ce que son arrivée t’a donné envie de créer différemment, d’expérimenter d’autres choses ?
Mon fils est arrivé il y a bientôt 2 mois et je suis donc encore en congé maternité. C’est donc une période à un rythme différent, de concentration sur l’essentiel qui est d’accompagner un tout petit nouveau dans la vie, c’est plein de douceur et le rythme ralentit, accentué depuis quelques jours par le confinement que nous vivons tous ! Cette actualité est aussi l’occasion pour moi de passer beaucoup de temps avec mes enfants au jardin (le petit en porte-bébé et la grande en bottes ! ) on plante, on aménage, on prend les rayons du soleil et regarde la nature se réveiller, les bulbes qu’on a planté il y a 6 mois sortir de terre….
J’ai fait beaucoup de broderie juste avant la naissance de mon fils et un peu continué depuis, heureuse d’avoir trouvé une nouvelle pratique qui n’est pas celle de mon métier. Je n’ai pas touché à mes crayons et mes gouges depuis plusieurs mois et ça commence à me démanger. En même temps j’accueille vraiment cette période car je sais qu’il en ressortira plein de nouvelles choses, de nouvelles envies. Je trouve que ces période où l’on s’accorde de se mettre un peu en veille sont toujours riches d’un point de vue créatif, même si l’on ne sait pas encore de quoi dans l’instant présent ! Un peu comme planter des bulbes pour la saison suivante en fait.
Ce printemps la nouveauté c’est la proposition d’un nouveau coloris que nous avons proposé pour l’ensemble des gravures pour Les Petits Mondes , sur un beau vert Céladon qui rappelle le réveil de la nature et qui apaise aussi, parce qu’on en a tous besoin ! Je reprendrai également ensuite mon calendrier d’ateliers dans les structures, les livraisons de tampons logo et de nouvelles créations bien sur.
Mon activité devrais reprendre courant avril, on en sera un peu plus d’ici la fin du confinement !
Un joli ouvrage réalisé pour la naissance de son fils.
Bonus : la mini-playlist « On écoute quoi chez Amélie ? »
Clairement le rock et la pop des années 1960 – 1970 reste ma préférence depuis toujours, ce qui m’apporte le plus d’émotions :
- Mon 1er CD offert par mon papa quand j’avais 8 ans : « Abbey Road » des Beatles, toute la fin de l’album est vraiment faite pour être écoutée dans d’ordre.
- The Kinks « Victoria »
- La B.O de « Good morning England » dans sa totalité
- The The , « This is the Day »
- Father John Misty, « Real love baby »
Retrouvez également le travail photographique de Capucine Lamoitte qui ponctue cette interview.